Jana Sterbak et la robe de viande

Vanitas - Robe de chair pour albinos anorexique de Jana Sterbak. (1987)
Vanitas - Robe de chair pour albinos anorexique de Jana Sterbak. (1987)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jana Sterbak (1955) est une artiste canadienne d'origine tchèque qui vit et travaille à Montréal et à Barcelone. ,

 

Dans cette représentation de robe, élaborée avec les techniques de la haute couture,

 http://elles.centrepompidou.fr/blog/?p=175

elle perturbe nos habitudes.

 

 

 

Effet de surprise entre ce que nous voyons et ce que nous reconnaissons...

 

De loin, la robe ressemble à un objet de mode avec une présentation semblable à celle des magasins de vêtements. De près, quand nous reconnaissons le matériau, de la viande desséchée, l'effet de la surprise et du dégoût !

 

L'intérieur révélé à l'extérieur

 

En employant l'intérieur du corps pour représenter une enveloppe, la robe, Jana Sterbak inverse l'intérieur et l'extérieur, comme pour mettre à jour une réalité cachée.

 

Une vanité

 

Dans le titre, elle évoque la vanité (vanitas-vanité : ce qui est vain n'a pas de réelle utilité parce que c'est illusoire, inutile, insignifiant, futile... ) et l'anorexie, pour critiquer la recherche du corps parfait avec la minceur véhiculée par les images des médias (télévision, magazines...).

 

 

Elle remet en question le stéréotype du corps dans notre société et rappelle aussi le danger de l'anorexie qui peut mener à la mort à force de se priver de nourriture. La référence au caractère albinos fait penser à une forme d'aveuglement face à la réalité. C'est le caractère vain des apparences qu'elle met en évidence : la robe, qui habituellement met en valeur le corps, devient un assemblage de chair et renvoie à l'image d'un corps écorché. L’œuvre peut aussi se comprendre comme une critique de l'image de la femme réduite à "un tas de viande".

 

Ainsi, Jana Sterbak questionne notre rapport au monde : en plus de l'image de la femme, le matériau soulève des questionnements multiples, de la condition animale à celle de l’œuvre d'art dans le temps

:

« Vanitas a fait scandale au Canada, mais a rencontré un grand succès partout ailleurs et elle est sans cesse copiée ! (...) elle se prête à quantité d’interprétations, depuis le non-respect des animaux élevés pour leur viande jusqu’au vieillissement et à la mort des individus, en passant par les rituels de possession, etc. Vanitas pourrait également évoquer les changements que le temps imprime à la perception des œuvres. Le jour du vernissage, quand on expose la robe, la chair est crue. Puis, la viande sèche et commence à ressembler au cuir ; elle devient alors acceptable. Cela est aussi vrai pour les artistes. »

Propos de Jana Sterbak recueillis par Catherine Francblin, in « La condition d’animal humain », art press, n°329, Déc. 2006,  p. 4.

 

 

 

25 ans après, Lady Gaga s'en est servi pour se donner une image de femme libre sans citer l'artiste...

 

 

Zhang Huan

Recouvert de viande pour simuler un corps musclé, Zhang Huan, bouddhiste (religion qui laisse les animaux libres et en vie), compare l'homme et l'animal, en mettant en parallèle leur place dans notre société.
Recouvert de viande pour simuler un corps musclé, Zhang Huan, bouddhiste (religion qui laisse les animaux libres et en vie), compare l'homme et l'animal, en mettant en parallèle leur place dans notre société.

Zhang Huan (1965), artiste chinois.

En 2002, il fait une performance, "My New York", en courant dans les rue de New York recouvert de viande.

Il se réfère au bodybuilding et emploie la chair pour critiquer la fragilité du corps quand sa solidité apparente, avec les muscles, est obtenue par dopage. C'est une critique du sport et de ses dérives avec la drogue qui met en danger la santé des sportifs. Il désire aussi mettre en avant la condition des travailleurs immigrés qui est difficile dans beaucoup de pays. L'expression "laisser (ou risquer) sa peau" pourrait illustrer l'image qu"il crée avec ce corps qui semble écorché.

  


Cette performance à New York fait aussi penser aux superhéros des comics américains qui incarnent des rêves impossibles avec des hommes aux super pouvoirs.

http://www.zhanghuan.com/ShowWorkContent.asp?id=19&iParentID=16&mid=1

 

 

Gilles Barbier (1965)

Gilles Barbier, Habiter la viande crue, 2013, technique mixte, galerie Vallois.
Gilles Barbier, Habiter la viande crue, 2013, technique mixte, galerie Vallois.